Les Tendances de consommation post-confinement

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“En fait, on a commencé la livraison avec nos clients fidèles, qui ont achetés pour nous soutenir. Puis ensuite, le bouche-à-oreille a fait que certains clients qui ne nous connaissaient pas du tout ont testé aussi ce service. Au final, lorsqu’on a rouvert, on a même eu des clients qui sont venus découvrir la partie bar, découvrir la boutique puisqu’ils ne connaissaient pas du tout la partie physique. Donc c’était bénéfique, bien sûr.”

La Plante du Loup

Les changements globaux en matière de comportement, de technologie, d’économie et d’écologie sont moteurs d’évolution et d’innovation dans le marché des boissons alcoolisées. Cependant, les tendances de consommation d’alcool ainsi que la stratégie de communication des marques ont été fortement bousculées par l’arrivée du Coronavirus et du confinement de ce début d’année 2020. Nous verrons ainsi, que malgré une situation délicate pour la plupart, certains ont néanmoins réussi à tirer leur épingle du jeu en faisant preuve de créativité. 👾

Accompagné de Guillaume et Constant de la cave à bières lyonnaise La Plante du Loup, nous revenons plein d’enthousiasme, d’humour retro et de passion sur ce vaste sujet. Nous analysons ensemble les tendances de consommation ayant émergé pour faire face à l’épidémie et à la phase post-covid.

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Retranscription

Aujourd’hui je reçois Guillaume et Constant de La Plante du Loup. Bonjour à vous deux !

Salut Ludovic !

Vous allez bien ?

Super !
Ouais, très bien, merci.

Alors nous allons parler dans ce premier épisode des outils et stratégies marketing mis en place par les brasseries et cavistes début 2020 pour faire face à la crise du coronavirus. Alors pour une petite présentation de qui vous êtes : j’ai pu noter que vous êtes une cave à bière et bar à bière dans le 7è arrondissement de Lyon. Vous avez une sélection de 350 références de bières artisanales en bouteilles et canettes, ainsi que quatre tirages pression permettant d’emporter ou consommer sur place les bières fraîches. Vous travaillez avec des acteurs locaux et nationaux dont plus de 60% de votre sélection provient de la France et de la région Rhône Alpes Auvergne et également un petit pourcentage pour les bières du monde. Vous avez un espace dégustation et vous proposez le growler. Est-ce que c’est à peu près correct ?

C’est une belle synthèse.

C’est exactement ça. Sachant que la partie du monde représente quand même 40% de nos sélections donc y’en a quand même pas mal, il y a pas mal d’américaines biens sûr, etc.
La présentation est bien faite effectivement car ça n’oublie à peu près aucun point essentiel de la boutique. Donc bien joué !

OK, c’est top. Un site internet, ça sert à ça hein. Du copier-coller et puis c’est bon ! Du coup pour reconnaître un petit peu plus en détail (ou non va voir), j’avais un petit quizz. L’idée est de répondre par une des deux réponses au choix. Il y a 11 questions et il faut être assez rapide vous êtes prêts ?

* SUPER-QUIZZ  Ã  écouter en podcast ðŸ˜‰ *

Je voulais revenir sur une chose que vous proposez et qui peut paraître assez récente. Pour ceux qui ne connaissent pas : qu’est-ce qu’est le growler ?

Le growler, historiquement ça vient du Canada. Le growler en soi, c’est un contenant qui fait en général autour de 1,89 litre (parce que l’unité de mesure du Canada est différente de celle qu’on a ici, ils parlent en gallons et autres).

À la base, le growler est utilisé via des growlers station pour permettre à tout consommateur de partir avec sa bière pression chez lui.

Par exemple, nous, ici, on a adapté nos formats de growler aux habitudes de consommation en France, c’est-à-dire qu’on a des bouteilles d’un litre sous forme de bouteilles de limonade. Parce que les bouteilles de 1,89 litre avec un cul très large, elles n’entrent pas dans nos frigos en France ou difficilement.

Et au final, l’idée c’est qu’une personne vienne, prenne un growler et le mette dans le growler station qui est relié à un fût de façon très classique.

Et la seule différence c’est qu’au moment du tirage, la machine va d’abord pousser du CO2 dans la bouteille, ce qui fait que ça va chasser l’air. La bière va ensuite couler contre les parois sans mousser de façon assez lente, justement pour éviter qu’il y ait une surcharge de mousse et que cette bière ne soit pas bien tirée. Et à la fin, quand on arrive au petit niveau d’un litre, on relâche la manette de tirage et à ce moment-là ça réinjecte du CO2, ça fait une sorte de contre-pression. Et dans ce cas-là, une petite mousse va se créer entre la fin de la bouteille et la hauteur du goulot. A la toute fin, quand la pression de la machine est redescendue, on retire, on referme et hop c’est emballé, pesé.

Et ça peut durer combien de temps pour le consommateur ?

Ça peut durer dix jours, on a fait des tests avec plus, mais en général on recommande dix jours. Après, une fois ouverte, bien entendu, comme n’importe quelle bière, il faut la boire dans la foulée, mais ce qu’on préconise c’est plutôt dix Jours.

Donc ça va un peu dans la tendance du vrac, comme on peut voir dans les épiceries du 7ème, où tu viens avec ton sachet, tu repars avec tes aliments en vrac. C’est la même chose pour la bière en fait, c’est écoresponsable ?

L’idée principale c’est ça, effectivement c’est de pouvoir consommer responsable de la bière de qualité et d’avoir un contenant qui est réutilisable ; parce que ta bouteille est réutilisable à vie, tant qu’elle n’est pas cassée, en fait tu peux la réutiliser.

J’ai vu également que vous aviez un slogan dont vous étiez fier c’était « une bière Ami-Ami ». Est-ce que vous pouvez nous nous expliquer ça ?

C’est un petit jeu de mots, on aime bien l’humour. En fait on est amis depuis longtemps avec Constant.

On aime bien l’humour, c’est une belle phrase. Moi j’aime bien rire.

En gros, on se connait depuis le lycée, donc on est amis. Et puis on a une passion commune : la bière. Et quand on a décidé de créer cette cave à bière, enfin en tout cas une entreprise au départ ensemble, on est arrivé facilement et très rapidement sur la bière, sur le monde brassicole. Et donc ça coulait de source en fait d’arriver sur « une bière Ami-Ami », c’est venu assez rapidement assez facilement.

C’est un petit clin d’œil à « un flic à Miami » et puis on s’est dit que le jour où on aura réussi c’est quand on aura une petite boutique qui aura poussé à Miami et donc là on aura fermé la boucle dans ce cas-là !

En tout cas c’est drôle et puis on voit bien le clin d’œil, c’est bien senti.  

Alors du coup, on va enchaîner avec ce dont on doit parler. Donc la crise du coronavirus a chamboulé la manière de travailler de tous les Français et ça a incité les marques et sociétés à penser différemment pour survivre. Malgré cette période très difficile pour la plupart, il s’agissait également d’un foisonnement créatif qui a permis de faire émerger plein d’idées et de nouvelles manières de communiquer. Pour votre cas, quel a été votre plan d’action mis en place durant la période de confinement ?

Au début quand on a vu arriver cette crise, parce qu’on la voyait quand même venir, on s’était dit « quinze jours de fermeture, on va savoir le tenir, c’est un moindre mal au final ».

Et puis quand on a commencé à voir au bout de trois-quatre jours de fermeture ce qui se passait en Italie, en Chine et autres pays, on s’est dit qu’en France c’était impossible que les fermetures ne durent que 15 jours également.

Donc là, on a vite compris qu’il fallait s’adapter et trouver une solution pour garder un contact avec nos clients et essayer de rentrer un minimum d’argent pour payer nos charges et nos fournisseurs. Et c’est comme ça qu’on est arrivé en fait à la livraison, au service de livraison. Puisque confinement signifie clients et personnes confinées chez elles, on s’est dit : « c’est nous qui allons aller à eux ».

On a eu une chance aussi, c’est qu’à peu près trois semaines avant le début du confinement, on a reçu une voiture qu’on avait achetée une semaine avant. On a reçu une voiture qu’on avait achetée pour pas trop cher et on s’était dit : « ça nous servira toujours pour faire des livraisons à droite à gauche ».

Et oui, ça nous a bien servi parce que sans ça on était un peu bloqués et ça nous a été très utile pendant cette période. Sans ça, on aurait sûrement changé de stratégie, on aurait peut-être fait de la vente à emporter en boutique parce que ça restait légal, puisque l’alcool et les cavistes étaient considérés comme des biens de première nécessité. Mais ce n’était pas notre objectif, parce que ce qu’on voulait justement était d’aller dans la tendance du confinement qui était de minimiser les déplacements des personnes. Et l’idée primaire était de se dire : « si les personnes ont besoin de bouger, c’est pour aller faire des courses ou pour aller à l’hôpital ou autre ». Mais on ne voulait pas qu’ils viennent jusqu’à chez nous.

Donc vraiment, au final cette voiture ça nous a été salvateur et ça nous a permis d’aller au contact du client avec tout un process qui nous permettait de ne pas entrer en contact et de maintenir une sécurité.

Donc la livraison à domicile en fait, c’est quelque chose que vous ne proposiez pas avant ça ?

Pas du tout, on s’est adapté en fonction de ce qu’on a vécu, tous.

Et du coup, maintenant que c’est levé, vous continuez à livrer à domicile ?

Alors, c’est une part beaucoup moins importante bien évidemment puisqu’on a repris… on a rouvert au 11 mai lorsque le gouvernement nous l’a autorisé (enfin, a arrêté le confinement) et on a rouvert la boutique à emporter. Donc les clients pouvaient revenir acheter à emporter les bouteilles de bière. Et puis au 2 juin, on a rouvert la partie consommation sur place.

Donc ces deux activités-là complètent la troisième qui était donc la livraison. Et la livraison, on la continue toujours, avec une activité qui est récente… En fait l’idée c’est qu’on livrait Lyon et 15 kilomètres autour de Lyon. Donc en fait, les clients de Lyon viennent en boutique et ceux qui sont aux alentours de Lyon ne se déplacent pas forcément à la boutique et on garde cette petite activité avec eux.

Et vous avez constaté que les autres cavistes du secteur faisaient la même chose ou… ?

Alors certains s’y sont mis aussi, oui, quelques semaines après nous en fait. Mais d’une autre manière, c’est-à-dire qu’ils n’allaient pas aussi loin entre guillemets, parce que 15 kilomètres ce n’est pas non plus très loin, mais il faut un véhicule en fait. Il faut un véhicule à moteur, il faut une camionnette parce que tu ne peux pas y aller en vélo … c’est compliqué. Donc en fait, oui, ils ont mis en place des choses aussi, mais pour les Lyonnais.

Et du coup, en termes de marketing, vous avez pas mal communiqué sur Instagram, peut-être sur Facebook. Je ne sais pas si vous êtes aussi actif sur Facebook ou plus sur Insta, comment vous avez mis en place cette démarche pour la faire connaitre ?

Ce n’est pas les mêmes communications qu’on applique sur Facebook et sur Instagram. Dans la façon dont on travaille, c’est Guillaume qui gère le compte Instagram, moi je gère le compte Facebook. On se tient au courant bien entendu. On a des interactions communes sur certaines choses, mais l’idée c’est d’avoir deux contenus à peu près différents. Alors forcément, il y a des choses qui reviennent sur les deux plateformes. Mais sur Facebook, la communication est plus légère, on va dire qu’elle parle beaucoup plus des nouveautés, elle parle du produit à 300 % quasiment. Et on n’est pas sur du flux permanent quotidien, il y a plusieurs postes dans une semaine.

Pour ce qui était d’informer dans ce cas-là tous nos clients qu’on arrivait avec une proposition de livraison, là c’étaient des postes communs bien entendu qui ont eu lieu sur les deux, à savoir Facebook, Instagram, les stories, tout ce qui était possible et utilisable. On l’a fait justement pour pouvoir montrer aux gens qu’on était là et qu’on avait adapté notre proposition.

Et puis après, ça s’est fait un petit peu par effet de bouche à oreille. On a eu des clients qui ont aimé nos livraisons, qui en ont parlé soit dans des groupes Facebook, soit à leurs amis directement lors de Skype-apéros en disant : « tiens, tu bois de bonnes bières ? » ; « bah ouais et c’est mon caviste pas loin qui m’a livré, bah attends, ne bouge pas, je te file l’adresse ». C’est comme ça qu’on s’est retrouvé même à faire des commandes groupées pour des immeubles où ils se connaissaient à peu près tous et on livrait un gros carton dans lequel on avait compartimenté pour Madame A, Madame B, Monsieur B et Monsieur C. En fait ce qui était marrant, c’est que toutes les copros comme ça ont créé avec le confinement des groupes sur Facebook. Et donc ça a créé du lien entre eux. Et en fait, cette communication-là a fait que, effectivement comme disait Constant, c’est que… Nicolas qui achetait de la bière chez nous en parlait sur le groupe de l’immeuble et du coup, ça a incité les autres à passer une commande, en tout cas à tester le service.

Donc les apéros digitaux vous ont bien servi et vous avez eu pas mal de nouveaux clients. Est-ce que ça a été profitable pour vous au final cette période ?

On a connu une petite baisse d’activité forcément, parce que ce n’est pas du tout le même volume réalisé entre une situation classique et une situation de confinement. Par contre, ça nous a fait connaître par d’autres clients.

En fait, on a commencé l’activité avec nos clients bien évidemment, nos clients fidèles, qui ont achetés pour nous aider, pour nous soutenir. Et puis ensuite, il y a eu l’effet bouche-à-oreille qui a fait que les certains clients qui ne connaissaient pas du tout La Plante du Loup ont testé aussi ce service. Et quand on avait rouvert, on a même eu des clients qui sont venus découvrir la partie bar, découvrir la boutique puisqu’ils ne connaissaient pas du tout la partie physique. Donc c’était bénéfique, bien sûr.

Le bouche-à-oreille, du coup ça a été un petit peu le facteur n°1 qui vous a permis de continuer, plus que le marketing sur Instagram par exemple ?

Ça c’est difficile à quantifier.

C’est un mix de tout, parce qu’effectivement il a beaucoup de nos clients aussi qui nous ont dit : « on a vu que vous étiez présents, que vous communiquiez pendant cette période, vous avez presque matraqué d’informations… ». On voulait des messages clairs, mais qui soient précis et qui soient diffus. Et je pense que c’est tellement difficile à quantifier… Forcément Instagram et Facebook ont eu leur part énorme de jeu là-dedans. Et il y a aussi eu une autre chose, c’est qu’on a eu pas mal d’articles aussi dans des magazines digitaux, ou papiers d’ailleurs, à Lyon.

Donc ça, ça a aussi eu un impact. C’est pareil, ce n’est pas quantifiable parce qu’on ne sait pas, le client ne nous disait pas : « je viens de la part du Progrès ». Mais par contre, c’est un tout en fait, c’est global. C’est-à-dire que t’as du bouche-à-oreille, t’as du réseau social et puis t’as du magazine classique, du journalisme classique.

Et du coup, ils parlaient du fait que vous livriez à domicile, c’était ça le but ?

Ouais, bien sûr ouais. En fait, ils ont fait pas mal d’articles sur les cavistes en règle générale, ce n’était pas forcément La Plante du Loup. Mais nous étions cités avec nos confrères dans ces articles et donc ils donnaient en fait tous les services que les cavistes proposaient. Donc un à un, il y avait cinq-six exemples à chaque fois, et donc ça a permis aussi de développer cette partie livraison.

On a eu aussi pas mal de personnes, suite à toute cette communication, qui nous ont contactés pour faire des cadeaux. Et ça en fait, ça a commencé doucement et après on en avait de plus en plus. Avec toutes les personnes qui étaient confinées, il y a eu un bon nombre de personnes qui n’ont pas pu célébrer leur anniversaire. Et untel, untel, untel disait : « tiens, je voudrais leur offrir un petit coffret de bières avec un petit mot si c’est possible ». Et donc on mettait ça en place, on aller livrer et puis il y en avait untel qui disait : « ah bah c’est super, ça s’est bien passé ».

Et pareil, ça continuait par voie de discussion ou même c’était mentionné aussi dans certains des articles.

Donc forcément, la communication croisée a bien fonctionné et nous a permis vraiment de taper sur plusieurs types de clients et plusieurs opportunités qu’on a pu avoir.

Et c’est vrai qu’on a élargi aussi notre audience parce que notre clientèle c’est du 25-45 ans, la moyenne d’âge chez nous.

Et pendant le confinement du coup avec les livraisons, la tranche d’âge a vraiment augmentée en fait. On a livré des personnes de 60 ans, des personnes d’un peu moins de 25 ans… On n’a pas touché que notre cible en fait, on a touché beaucoup plus de personnes.

Donc vous vous êtes fait une petite renommée en plus durant cette période.

Et effectivement, sur Instagram, vous avez matraqué pas mal les mêmes templates, mais qui sont assez jolis et ont un message clair. Le « soutenez la filière brassicole Â», pour moi, je l’associe à La Plante du Loup. Le fait faire revenir tous les jours ces messages en stories, au final ça fonctionne, ça reste en tête, je trouve.

Tant mieux ! Comme disait Constant, on le fait nous-mêmes en fait. On n’est pas des professionnels de la chose, mais au fur et à mesure on essaie de comprendre comment ça fonctionne. Et c’est vrai qu’on essaie d’être simple, efficace, des messages clairs. Et c’est vrai que le message premier qu’on voulait faire passer, c’était de soutenir la filière brassicole. Il y a pas mal d’articles qui sont sortis d’ailleurs, des millions de litres ont été jetés pendant le confinement. Et donc, il y a beaucoup de brasseurs aujourd’hui qui peut-être, malheureusement, vont mettre la clé sous la porte. Peut-être pas maintenant, peut-être pas en juillet-août, mais on va certainement sentir ces éléments-là en fin d’année ou début d’année 2021 et c’est ça la problématique.

Donc le message était vraiment ça, c’était : « on a mis en place un service de livraison et ça nous soutient, nous aussi, parce qu’il faut bien qu’on se rémunère aussi, qu’on paye nos charges, qu’on paye nos fournisseurs ». Mais c’était surtout ça, c’était payer nos fournisseurs. C’était aider les brasseurs régionaux parce qu’on a beaucoup acheté aussi au niveau régional. On a acheté un peu en international, on disait tout à l’heure 40 %. Je pense que pendant le confinement, on est bien monté en France et régional, on a dû monter à 80 %.

Après, toujours dans cette démarche de soutenir la filière brassicole, ce qu’on a fait, et c’était plutôt convenu entre nous, c’est qu’effectivement on voulait que tous les brasseurs, nos distributeurs avec qui on bosse puissent aussi eux recevoir leur dû.

Ce qu’on a mis en place c’est que durant toute cette période-là, on a payé tous les brasseurs à la livraison, alors que normalement on a la possibilité de payer tous nos fournisseurs à J+30. Mais dans cette idée de se dire : « on met tout ça en place, ce n’est pas que pour nous, c’est pour un global et on a envie qu’un peu tout le monde s’en sorte et que tout le monde puisse payer ses propres charges et payer ses propres factures ». On s’est dit, vu qu’on avait un peu de trésorerie : « ça va nous permettre au début de payer directement les personnes à la réception des produits ». Et c’est ce qu’on a fait jusqu’à la fin du confinement et on le fait encore un petit peu aujourd’hui.

Donc ça nous a permis de les soutenir, les clients nous ont soutenus, c’est un cercle vertueux !

Ouais, c’est le karma : quand on soutient, on se fait soutenir, ça finit par revenir.

Est-ce que vous voyez une stratégie post-Covid, est-ce que vous avez réfléchi à de nouvelles choses, est-ce que ça a germé un peu, est-ce que vous allez reprendre juste comme avant, qu’est-ce qui se profile ?

Alors effectivement, déjà c’est reprendre nos marques. On a mis une semaine à reprendre nos marques de service, parce que c’est vrai que ça se perd vite au final.

De rentrer de plus en plus de nouveautés, ça c’est aussi un axe. On avait déjà pas mal de nouveautés, toutes les semaines on en reçoit, mais c’est encore s’activer là-dessus. Et bien évidemment, garder cette partie livraison et certainement développer aussi la partie vente en ligne.

OK, d’accord. Parce que pour le moment, vous n’avez pas encore de boutique, c’est ça ?

Non, non. On n’a pas du tout de site marchand (NDLR : La Plante du Loup ont à présent un site marchand : https://eshop.laplanteduloup.fr) et l’idée c’est peut-être d’aller dans cette direction. Pourquoi ? Parce qu’on s’est rendu compte quand même qu’un confinement… j’espère qu’il n’y aura pas d’autres dans les années à venir, mais des pandémies, des épidémies, on risque peut-être d’en avoir d’autres ou en tout cas d’autres problématiques extérieures. On a subi quelque chose d’extérieur qui n’est pas de notre fait. Et du coup, on a bien vu que toute la partie en ligne, le sans contact, etc., a pris quand même une ampleur assez importante, aussi bien chez les gros distributeurs qui connaissaient déjà ce métier et ceux qui s’y sont mis rapidement… comme nous un peu, c’est-à-dire on commande par SMS ou par Instagram ou par Facebook.

Donc, est-ce que la tendance va continuer ? Nous on pense que oui et donc du coup on va investir, c’est certain, dans un site internet marchand pour la vente au niveau régional et au niveau France.

OK, très bien. Oui, j’ai vu qu’il y avait d’autres cavistes qui faisaient ça. D’autres cavistes que j’avais contactés notamment à Toulouse, La Bièrothèque, je ne sais pas si ça vous parle ?

Oui, la Bièrothèque.

Ils ont un site vraiment bien fait et ils ont une boutique en ligne aussi. Donc certaines caves en ont, certaines n’en ont pas…

Mais c’est un peu la même histoire pour eux et leur site, il a été lancé pendant le confinement.

Juste avant, non ?

Je ne sais pas si c’est juste avant ou… je crois que c’est pendant. Donc au final, ça se joue à peu de choses près, en tout cas c’est très récent leur site. Et effectivement, ils ont un beau site, ils ont une belle communication. La Bièrothèque c’est une belle boîte.

De toute façon, ce qu’il faut retenir c’est que le Covid-19 a eu un impact bien évidemment sur toutes nos activités, notamment les cavistes dont on parle. Il y a eu des effets négatifs, mais il faut aussi voir le côté positif. Et nous on est plutôt dans ce côté-là, on voit plutôt le verre à moitié plein qu’à moitié vide. C’est-à-dire qu’il faut plutôt rebondir, trouver une dynamique pour essayer de trouver des solutions et avancer dans ce sens-là.

Totalement, je suis tout à fait d’accord. Et du coup, pour finir, est-ce que vous pouvez nous parler un petit peu de vos clients, est-ce qu’il y a des tendances qui se dessinent ces derniers mois en termes de style de bière ou de manière de consommer ?

Alors oui. En termes de style… le style évolue bien entendu. Il y a beaucoup de personnes aussi qui vont boire pendant trois mois tel type de bières et qui vont changer. Ce qui dessine beaucoup, on en a de plus en plus, c’est les clients entre guillemets Sour, qui veulent boire des Sour, qui veulent boire des Berliner Weisse, qui veulent boire des Gose. Et à la recherche toujours d’une acidité bien faite avec plein de fruits ou même des recettes entre guillemets bizarres, enfin qu’on n’aurait pas eu à la base l’idée d’associer, mais au final des Gose comme celui d’Iron à la betterave-passion, c’est juste un délice et nous nos clients, ils adorent ça.

On a de la Brasserie du Haut-Buëch, un Berliner qui est avec tomate et harissa. On va avoir des choses qui sont recherchées et des recettes de bières Sour qui partent dans tous les sens et c’est ce que cherchent un peu nos clients désormais.

Donc maintenant que la IPA est trop connue, ça devient has been, c’est ça ? Ça a mis du temps à venir, mais maintenant…

Alors, il ne faut pas exagérer quand même parce les  IPA, ça reste ce qu’on vend le plus ici, bien entendu.

Et surtout qu’en plus, IPA maintenant c’est tellement large. Il y a tellement de choses qu’en fait, Ce n’est plus un style, c’est des styles. À chaque fois d’ailleurs on pose toujours la question :  Â« qu’est-ce que tu cherches, tu veux du résineux, tu veux du fruité ? Â» C’est quand même très large la partie IPA, donc ça reste quand même un gros secteur de vente.

Et ce qui se boit beaucoup en ce moment dans les IPA et nous ce qu’on remarque, c’est qu’on a pas mal de demandes sur les Milkhake IPA, enfin du crémeux, du crémeux à foison avec des doubles dry hop, des trucs assez puissants qui peuvent monter en triple IPA ou autres, des juicy IPA, des ice IPA, voilà, tout ce qui est NEIPA… tout ce qui va apporter le côté douceur et qui démocratise au final l’IPA. Parce qu’on a plein de personnes qui arrivent et qui disent : « non, moi je n’aime pas la IPA », ils n’aiment pas l’amertume et qui sont avec quelqu’un qui leur dit : « mais goûte une IPA, tu vas voir, on en reparle après ». Et puis après test, ils font : « ah bah oui, mais je ne savais pas que j’aimais l’amertume aussi ». Là c’est contrebalancé à fond avec du fruit qui provient des houblons. Maintenant on donne l’IPA à tout le monde et en fait c’est ça qui convertit certains consommateurs et puis au fur à mesure ils vont aller chercher de plus en plus de sensations comme des accros au crac !

J’ai l’impression que la bière, ça commence à avoir le standing du vin. Plus ça va, plus c’est subtil, plus il y a de la diversité. Je comparais ça un peu au hip-hop où c’est en ce moment le style musical qui a le plus de variétés possibles et inimaginables et du coup j’ai l’impression que la bière est forte pour ça. Elle intéresse beaucoup… de plus en plus de gens. Enfin en tout cas c’est mon point de vue, je ne sais pas le vôtre là-dessus, mais… 

Il y a des brasseurs et il y a des artistes après. Il y a des personnes qui appliquent tellement de précision dans une recette et qui vont travailler ça. Après, c’est un coût forcément, il y a un coût d’apprentissage et puis il y a aussi un coût de recette et donc ça se répercute en général souvent sur des bières qui commencent à monter en termes de prix.

En France, en Belgique… enfin les lambics, on a historiquement les Cantillon et autres qui existent depuis un peu de temps, mais qui sont à la mode depuis une dizaine d’années ou peut-être plus, mais je vais parler du milieu vraiment geek des bières.

En France, on a Ammonite qui arrive depuis quelque temps déjà et qui fait des trucs… c’est merveilleux, c’est éclectique ce qu’il fait et il y a plein d’autres choses. On n’en a pas malheureusement d’Ammonite ici, on aimerait bien en avoir, mais… peut-être un jour, qui sait.

Il y a tellement de belles recettes, tellement de belles choses et ça va dans les extrêmes. On a remarqué aussi que… là on a reçu cette semaine les deux nouveaux eisbock de la brasserie La Débauche qui titrent respectivement à 22 et à 30°. Et on a des clients pour qui, que ça fasse 22%, 30%, 70%, cherchent l’expérience de ces eisbock de La Débauche par exemple.

La recherche d’expériences c’est quelque chose qu’on a vraiment beaucoup.

Donc ça peut être une nouvelle tendance, une nouvelle manière de consommer, c’est la recherche d’expériences, c’est de plus en plus au cœur de l’achat d’une bière craft ?

Ouais, complètement. Tout à l’heure Constant disait « les gens arrivent et disent : je veux quelque chose de bizarre ou quelque chose d’étonnant ». On a de plus en plus de clients qui viennent… que ce soit des garçons ou des filles d’ailleurs, il n’y a pas de problématique là-dessus. C’est : « je veux un truc différent, qui change, que j’ai jamais entendu ». Et il y a aussi pas mal de bières élevées en fût et je trouve qu’on en a de plus en plus quand même et on en vend de plus en plus.

Et je pense qu’avec ce confinement, il y a de nombreux brasseurs pour acheter des fûts pour éviter de jeter certains litres de bière et l’ont mis en barrique pour pouvoir le remettre en circuit d’ici six mois/un an ou plus.

Et donc, je pense qu’on était déjà sur une belle tendance des bières élevées en barrique et ça va se continuer et se confirmer.

Mais voilà, en fait les trois tendances, c’est les Sour clairement, les IPA mais au sens large, c’est-à-dire les Neipa, les dry hop, les juicy, les ice, etc.

Et puis moi je mettrais aussi quand même les barriquées, les barriquées de plus en plus, pour l’expérience, voilà.

Et le growler du coup, est-ce que ça fait partie des nouvelles manières de consommer que vous voyez se développer très rapidement ?

Très rapidement, je ne suis pas certain. En fait c’est vraiment une question de consommation. Les clients qui sont utilisateurs du growler, du système growler, reviennent toutes les semaines, toutes les deux semaines, ils viennent et ils changent. Parce que nous, les bières qu’on propose, on roule aussi assez régulièrement pour proposer toujours des nouveautés ou même des retours sur des bières qu’on a déjà eues. Le taux de création de nouveaux clients pour ça, il existe, mais il n’y a pas pour autant un essor sur la recherche du growler. Pas autant que sur la découverte des styles dont on a parlé auparavant en tous cas. On a des clients growlers, ça continue de grossir, mais ça ne reste pas le secteur prioritaire – en tout cas pour le moment en France.

Après, le growler pendant le confinement a eu bonne presse. Parce que pas mal de brasseurs se sont servis de growlers, des machines qui étaient présentes chez des cavistes, dans des restaurants, ou même eux ont investi dans un système de growler pour pouvoir écouler leurs fûts. Parce qu’un moment donné, comme les bars et restos étaient fermés, les fûts ne partaient plus. Donc il fallait trouver un système pour limiter un peu la casse et c’est vrai qu’on a vendu pas mal de growlers aussi pendant le confinement. Et les brasseurs s’y sont mis aussi.

SUPER

POTION !

Ludovic Mornand

Ludovic Mornand

PODCASTER & BOSS FINAL

Ludovic est le fondateur et directeur de Studio Blackthorns et SuperPotion™. Il anime les émissions SuperPotion™, The Bottlefield Show et 1000 Hectos, toutes les trois spécialisées dans le secteur de la boisson.

« À travers ce podcast, à la fois fun et enrichissant, j’ai souhaité marquer mon empreinte d’expert dans le secteur de la boisson alcoolisée et non-alcoolisée en invitant des professionnels de l’industrie : brasseurs, distillateurs, vignerons, cavistes, journalistes. Mon but est d’apporter de l’inspiration à ces acteurs de la filière Potions pour les aider à sans cesse se renouveler. C’est ainsi qu’est né le podcast SuperPotionâ„¢, une émission divertissante et empreinte de nostalgie pop-culture pour les années 90s. SuperPotion, un élixir d’innovation pour sublimer toutes vos boissons ! »