Loi Évin : le guide complet pour communiquer sur vos boissons alcoolisées en 2025

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SOMMAIRE
  1. Contexte : Une législation qui évolue peu, mais des risques qui persistent
  2. I. Sponsoring, sport et bière sans alcool : les règles du jeu
  3. II. Vente et consommation d'alcool dans les lieux sportifs
  4. III. Communication, publicité et réseaux sociaux : le champ de mines
  5. IV. Étiquetage, identité visuelle et packaging
  6. V. Événements, dotations et mécénat : Les montages autorisés
  7. VI. Stratégie "sans alcool" et extensions de gamme : L'eldorado réglementaire ?
  8. VII. Mineurs, jeunes publics et messages sanitaires : la protection renforcée
  9. VIII. Sanctions, contrôles et risques juridiques : ce que vous risquez vraiment
  10. Cas Limites et zones grises : les questions sans réponse claire
  11. Conclusion : Naviguer dans la complexité avec méthode
  12. Ressources complémentaires
  13. Récents épisodes

La Loi Évin reste en 2025 l’une des réglementations les plus strictes au monde en matière de communication sur l’alcool. Dans cet épisode exceptionnel de 160 minutes, Benjamin Gourvez, avocat spécialisé et expert reconnu de la Loi Évin, décrypte point par point les subtilités de cette législation complexe.

Chiffre clé : la France impose des restrictions parmi les plus rigoristes d’Europe, avec seulement 12 thèmes autorisés pour communiquer sur l’alcool. L’avocat révèle que le « risque zéro » n’existe pas en communication alcool, et que même une bouteille en rayonnage peut devenir problématique dès qu’elle est reproduite à des fins publicitaires. Format inédit : cet épisode répond à des dizaines de questions concrètes collectées pendant 9 mois via le chatbot IA spécialisé Loi Évin de SuperPotion™.

Contexte : Une législation qui évolue peu, mais des risques qui persistent

Pas de grands changements législatifs en 2025, mais une vigilance accrue

Benjamin Gourvez rappelle d’emblée qu’aucune modification majeure de la Loi Évin n’est intervenue en 2025. Cependant, plusieurs initiatives parlementaires et expérimentations locales montrent une tendance au durcissement :

  • Proposition de loi transpartisane (inscrite en décembre 2024) visant à interdire toute communication sur l’alcool sur les réseaux sociaux et à limiter l’affichage dans un périmètre de 250 mètres autour des établissements scolaires
  • Expérimentation à La Réunion incluant l’interdiction des boissons alcoolisées réfrigérées en supermarchés et des restrictions de communication près des écoles
  • Recommandations européennes suggérant de remplacer le message sanitaire actuel par « L’alcool provoque le cancer » ou « L’alcool tue »

L’avocat souligne un paradoxe français : « La France est le pays le plus rigoriste en matière de communication sur l’alcool, mais considère qu’une boisson à 1,2% d’alcool est ‘sans alcool’« . Cette incohérence crée une confusion réglementaire notable.

La jurisprudence José Garcia : un tournant pour le packaging

La jurisprudence José Garcia (2024) marque un moment décisif dans l’interprétation de la Loi Évin concernant le conditionnement. Benjamin Gourvez, qui a représenté la défense dans cette affaire, explique :

« Les juges ont clairement établi que le conditionnement n’est soumis à la Loi Évin que s’il est reproduit à des fins publicitaires. Une bouteille en rayonnage n’est pas de la communication, c’est l’accès du produit au consommateur. »

Cette décision (actuellement en appel) confirme que :

  • Le packaging en lui-même n’est pas réglementé par la Loi Évin
  • Seule sa reproduction dans un contexte publicitaire l’est
  • Les e-shops peuvent afficher des visuels de bouteilles aux fins d’information du consommateur, sans action promotionnelle

Sanctions évoquées : contrairement aux titres sensationnalistes (100 000€), les condamnations réelles tournent autour de 20 000€ maximum par partie.

I. Sponsoring, sport et bière sans alcool : les règles du jeu

L’interdiction de principe du parrainage sportif

Article L3323-2 du Code de la Santé Publique : « Toute opération de parrainage est interdite lorsqu’elle a pour objet ou pour effet la propagande ou la publicité directe ou indirecte en faveur des boissons alcooliques. »

Benjamin Gourvez décortique cette interdiction :

Définition du parrainage : Association d’une marque à un événement, organisme ou personne dans le but d’obtenir une visibilité en contrepartie. C’est précisément cette instrumentalisation à des fins de communication qui est prohibée.

Publicité indirecte : Concept crucial souvent méconnu

  • Utiliser un logo de marque d’alcool = publicité indirecte
  • Mentionner une marque sans montrer le produit = publicité indirecte
  • Reprendre des codes couleurs ou éléments graphiques reconnaissables = publicité indirecte

Exemples concrets d’interdictions :

  • Logo de brasserie sur maillot de football : interdit
  • Nom de marque d’alcool comme sponsor d’un tournoi : interdit
  • Panneaux LED dans un stade mentionnant une marque d’alcool : interdit (support non autorisé + parrainage)

Les alternatives légales : mécénat et contrat de fourniture

Deux options restent possibles, mais sous conditions strictes :

1. Le Mécénat

Jurisprudence de référence : Rock en Seine / Brasseries Kronenbourg

Conditions impératives :

  • Communication sous la raison sociale de l’entreprise, pas la marque d’alcool
  • Logo institutionnel différent du logo commercial
  • Typographie et couleurs distinctes de la marque
  • Mention discrète (page « mécènes » d’un site, dernière page d’un programme)
  • Aucune action promotionnelle autour de ce mécénat

Exemple Kronenbourg : Logo doré des « Brasseries Kronenbourg » (institutionnel) vs logo rouge et blanc de « Kronenbourg » (marque). La distinction a permis d’éviter la condamnation.

2. Le Contrat de fourniture

Jurisprudence : Taittinger / Festival de Cannes

Conditions :

  • Communication purement informative : « X est le fournisseur officiel de l’événement »
  • Sous la raison sociale, pas la marque
  • Pas de campagne publicitaire associée
  • Pas de kakemonos, panneaux ou affichage sur le lieu (sauf dans l’espace de consommation stricto sensu)
  • Limité à un communiqué de presse ou une mention factuelle

Bière sans alcool et sponsoring : la solution miracle ?

Règle fondamentale : Une bière à moins de 1,2% d’alcool n’est pas soumise à la Loi Évin.

Jurisprudence Heineken 0.0 : Tournant majeur

Heineken avait tenté de sponsoriser des événements sportifs avec sa gamme 0.0, considérant qu’elle n’était pas alcoolisée. Résultat : condamnation pour publicité indirecte.

Raison : Le nom « Heineken 0.0 » fait directement référence à la marque mère alcoolisée. C’est de la publicité indirecte pour l’alcool, même si le produit promu ne l’est pas.

Solution conforme :

  • Créer une marque totalement distincte pour le sans alcool
  • Nom différent, logo différent, charte graphique différente
  • Aucun élément visuel rappelant la marque alcoolisée
  • Pas de code couleur commun

Exemple théorique acceptable : Une brasserie « Les Brasseurs du Mont Blanc » (marque alcool) pourrait créer « Altitude Zéro » (marque sans alcool) avec une identité visuelle totalement différente pour sponsoriser un club sportif.

Attention : La tentation de créer « Les Brasseurs du Mont Blanc 0.0 » serait une erreur juridique.

Club sportif co-brandé avec une brasserie : possible ?

Question : Un club peut-il commercialiser une bière avec son logo en partenariat avec une brasserie ?

Réponse : Non, formellement interdit pour les boissons alcoolisées.

Raisons :

  1. Association directe sport/alcool (thème prohibé)
  2. Le logo du club devient un élément de promotion de l’alcool
  3. Risque de concurrence déloyale (observé dans certains cas avec des spiritueux aux couleurs de clubs)

Exception : Possible pour une bière sans alcool (< 1,2%), car elle n’est pas soumise à la Loi Évin.

Cas observé : Benjamin Gourvez mentionne avoir vu des spiritueux « aux couleurs de clubs sportifs » commercialisés, mais précise que c’est totalement contraire à la loi, même si non poursuivi à ce jour.

II. Vente et consommation d’alcool dans les lieux sportifs

Le cadre réglementaire : interdiction de principe, dérogations encadrées

Article L3335-4 du Code de la Santé Publique : La vente et la consommation d’alcool sont interdites dans les installations sportives.

Dérogations possibles :

  • Accordées par le maire de la commune
  • Maximum 10 dérogations par an par association sportive ou équipement
  • Durée maximale : 48 heures par dérogation
  • Alcools autorisés : uniquement jusqu’à 18% d’alcool (vin, bière, cidre – pas de spiritueux)

Procédure :

  • Demande en mairie au moins 3 mois avant l’événement
  • Délai réduit possible (15 jours) en cas d’événement exceptionnel, mais déconseillé
  • Préciser : date, nature de l’événement, horaires, types de boissons

Sans autorisation : Seules les boissons sans alcool (< 1,2%) peuvent être proposées.

Différence entre événement sportif et concert au stade

Question cruciale : Les règles sont-elles identiques pour un match et un concert dans un stade ?

Réponse : Non, les règles diffèrent.

Événement sportif : Réglementation stricte avec système de dérogations (10 maximum/an)

Concert ou événement culturel dans un stade :

  • Réglementation plus souple
  • Autorisation de buvette temporaire (simple information à la mairie)
  • Pas de limite stricte de 10 événements
  • Alcools légers autorisés sous conditions

Attention : Benjamin Gourvez met en garde contre la communication autour de ces événements. Associer musique et alcool dans une campagne publicitaire reste contraire à la Loi Évin (thème festif/convivial prohibé).

Consommation offerte vs vente : quelle différence ?

Question : Un club peut-il servir gratuitement de l’alcool lors d’une réception d’après-match ?

Réponse complexe :

Principe : L’offre d’alcool est interdite car considérée comme une incitation à la consommation.

Exception : Séances de dégustation possibles sous conditions strictes

  • Verres de 3 à 5 cl maximum
  • Dans des établissements autorisés (caves, bars)
  • Jamais sur la voie publique
  • Identification du professionnel qui offre

Réception privée d’après-match :

  • Si ouverte au public : soumise aux mêmes règles que les foires/événements publics (autorisation du maire requise)
  • Si strictement privée (invités ciblés) : réglementation générale des réceptions privées
  • Impératif : aucune communication publique sur cette réception (pas de posts Instagram, pas de photos avec verres à la main)

Règle d’or : « Une goutte d’alcool contamine l’intégralité du contenu ». Si vous communiquez sur une réception où de l’alcool est servi, toute la communication devient soumise à la Loi Évin.

Circuler avec un verre d’alcool autour d’un stade : autorisé ?

Réponse : Dépend des arrêtés municipaux locaux.

Principe général :

  • Pas d’interdiction nationale de consommer de l’alcool sur la voie publique
  • Interdiction de l’état d’ébriété sur la voie publique (infraction pénale)
  • Réglementation locale via arrêtés municipaux

Exemples parisiens :

  • Canal Saint-Martin : interdiction
  • Pont des Arts : interdiction
  • Abords de certains stades : souvent interdiction

Raison des interdictions locales : Risques de sécurité, nuisances sonores, risques de chute (canaux, ponts)

Conseil pratique : Vérifier les arrêtés municipaux de la commune concernée avant tout événement.

III. Communication, publicité et réseaux sociaux : le champ de mines

Les fondamentaux de la Loi Évin : ce qu’il faut retenir absolument

Benjamin Gourvez rappelle les 3 piliers de la Loi Évin :

1. Supports autorisés (Article L3323-2)

Liste limitative et d’interprétation stricte :

  • Presse écrite
  • Radio (conditions horaires)
  • Affichage (papier uniquement)
  • Internet (services de communication en ligne)
  • Envois par courrier
  • Affichage dans les lieux de vente
  • Objets publicitaires (conditions strictes)

Jurisprudence Heineken – Bâche de chantier : Une bâche n’est pas une affiche (car pas en papier) → condamnation. Illustration parfaite de l’interprétation stricte.

Panneaux LED : Non autorisés (jurisprudence de Cour d’Appel confirmée)

2. Thèmes autorisés (Article L3323-4)

12 thèmes exclusifs :

  1. Dénomination
  2. Composition
  3. Mode d’élaboration
  4. Degré volumique d’alcool
  5. Qualités organoleptiques
  6. Modalités de vente
  7. Mode de consommation
  8. Origine
  9. Terroir
  10. Distinction (médailles, récompenses)
  11. Références historiques
  12. Conditionnement (si reproduit)

Recommandation ARPP : Document essentiel qui précise chaque thème. À consulter absolument sur le site de l’ARPP.

3. Message sanitaire obligatoire

Texte exact : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération. »

Règles d’affichage (Recommandation ARPP 3.3) :

  • Exclusivement à l’horizontale
  • Caractères imprimés en gras
  • Couleur tranchant avec le fond
  • Taille : minimum 1/100e de la somme hauteur + largeur de l’annonce
  • Sur chaque publication (post, story, vidéo)

Placement :

  • Sur la photo OU dans le texte (pas obligatoirement les deux)
  • Pas d’obligation de position (début/fin), mais doit être lisible
  • Sur chaque story si plusieurs stories successives

Cas particulier de la bio Instagram : Aucune obligation légale, mais recommandé par précaution.

Réseaux sociaux : règles spécifiques par plateforme

Instagram, TikTok, Facebook : tous égaux devant la Loi Évin

Principe : Tous les réseaux sociaux sont des « services de communication en ligne » → soumis à la Loi Évin.

LinkedIn : Contrairement à une idée reçue, LinkedIn est également soumis à la Loi Évin. « Ce n’est pas parce que c’est un réseau professionnel que la Loi Évin ne s’applique pas », insiste Benjamin Gourvez.

Snapchat : Cas particulier – majoritairement mineur → à éviter pour toute communication alcool.

TikTok : Désormais majoritairement majeur → autorisé sous réserve de respecter la Loi Évin et de cibler +18 ans.

Règles des plateformes : un niveau supplémentaire de contraintes

Meta (Facebook/Instagram) : Dispose d’une fiche alcool spécifique dans ses conditions d’utilisation.

Risque : Se faire désinscrire ou radier pour non-respect des CGU, indépendamment de la Loi Évin.

Exemple concret : Ludovic Mornand témoigne de l’impossibilité de faire de la publicité payante pour ses rapports stratégiques sur l’alcool, bien qu’il ne vende pas d’alcool. Les algorithmes détectent les mots-clés et bloquent automatiquement.

Ciblage et restrictions d’âge

Ciblage négatif : Possibilité (et recommandation) d’exclure les moins de 18 ans dans les paramètres de ciblage.

Compte international : Alternative possible

  • Compte intégralement en anglais
  • Public majoritairement international (60-70% minimum)
  • Pas d’export du produit en France ou export très limité
  • Attention : Si le public reste majoritairement français malgré la langue anglaise, c’est considéré comme de l’abus de droit

Loi Toubon : Rappel important – toute communication destinée au public français doit être au minimum traduite en français.

Personnages et représentation humaine : la zone rouge

Règle générale : Seules certaines personnes peuvent être représentées dans une publicité pour l’alcool.

Personnes autorisées (Recommandation ARPP) :

  • Ayant une fonction effective dans la chaîne de production, distribution ou présentation du produit au consommateur
  • Exemples : maître de chais, viticulteur, vendangeur, chef de cuisine, sommelier, caviste, barman, serveur

Obligations :

  • Nommer la personne (au minimum par son prénom)
  • Indiquer sa fonction
  • Préciser son lieu d’exercice

Exemple conforme : « Marie, barmaid à l’Hôtel Neptune, Marseille » (campagne Ricard)

Personnes NON autorisées :

  • Directeur marketing, directeur communication → Non (pas dans la chaîne de production effective)
  • Directeur général → Discutable (sauf s’il participe effectivement à la production)
  • Consommateurs → Interdit
  • Célébrités (sauf si fonction professionnelle dans la chaîne) → Interdit

Jurisprudence Scarlett Johansson / Moët Chandon / Paris Match :

  • Paris Match condamné pour avoir publié des photos de Scarlett Johansson (égérie de Moët)
  • Moët non condamné car a prouvé avoir envoyé deux jeux de photos (France/International) et que Paris Match a publié les mauvaises par erreur
  • Illustration de l’absence de complicité si la marque n’a pas incité à la publication

Morceaux de corps : Même règle !

  • Une main tenant un verre doit être identifiée (nom, fonction)
  • Sinon, considérée comme représentation d’un consommateur → interdit

Posts LinkedIn et valorisation des équipes : attention danger

Question fréquente : Peut-on présenter les membres de l’équipe d’une marque d’alcool sur LinkedIn ?

Réponse nuancée :

Si le compte est celui de la marque d’alcool :

  • Toute publication = publicité indirecte pour l’alcool
  • Doit respecter les thèmes autorisés
  • Doit inclure le message sanitaire

Si on parle de l’alcool dans la publication :

  • « Notre vin particulièrement bon » → Contamination de tout le contenu
  • Toute la vidéo/le post devient soumis à la Loi Évin
  • Risque de non-conformité si éléments non autorisés (musique, ambiance festive, etc.)

Solution :

  • Parler uniquement du parcours professionnel de la personne
  • Aucune mention du produit alcoolisé
  • Contexte professionnel/RH pur
  • Pas de « 5 questions dont : quel est ton cocktail préféré ? » → Interdit

Règle d’or : « Une goutte d’alcool contamine l’intégralité du contenu. »

Emojis et éléments graphiques : les pièges invisibles

Attention aux emojis : Ils sont interprétés comme des éléments de communication à part entière.

Emojis à proscrire :

  • ☀️ Soleil (connotation vacances/évasion)
  • 🏖️ Plage (idem)
  • 🎉 Fête (connotation festive interdite)
  • ❤️ Cœur (connotation sentimentale/passion)
  • 🎄 Sapin de Noël (lien avec festivités)

Raison : Ces emojis renvoient à des thèmes non autorisés (farniente, festivités, évasion, passion, convivialité).

Emoji acceptable : 🍇 Raisin (si on parle de composition/origine du vin)

Cas complexe : 🌋 Volcan pour un vin de terroir volcanique

  • Acceptable si lien direct avec le terroir de production
  • Risqué si utilisé de manière opportuniste ou pour créer une ambiance

Principe de précaution : En cas de doute, ne pas utiliser d’emoji.

Thèmes particulièrement à risque

Interdictions quasi-systématiques (jurisprudence constante) :

  • Farniente, vacances, évasion
  • Festivités (Noël, Saint-Valentin, fêtes)
  • Passion, amour, séduction
  • Réussite sociale
  • Convivialité, partage (même si c’est la réalité de la consommation)
  • Sport (jurisprudence abondante)
  • Musique, concerts (sauf exception très encadrée)

Jurisprudence Bud : Campagne « Bud » (référence au but de football) → Condamnation pour association sport/alcool.

IV. Étiquetage, identité visuelle et packaging

La grande clarification : le packaging n’est PAS soumis à la Loi Évin

Position de Benjamin Gourvez (confirmée par la jurisprudence José Garcia en première instance) :

« Le conditionnement, en lui-même, n’est pas soumis à la Loi Évin. La loi ne réglemente pas comment est faite la bouteille, comment elle est commercialisée, ou ce qu’il y a sur l’étiquette, dès lors que ces éléments ne sont pas utilisés à des fins de communication. »

Article L3323-4, alinéa 3 : « Le conditionnement, s’il est reproduit, est soumis aux thèmes [autorisés]. »

Interprétation stricte (droit pénal) :

  • « S’il est reproduit » = condition
  • Si pas reproduit = pas soumis aux thèmes autorisés
  • Une bouteille en rayonnage = accès du produit au consommateur, pas de la publicité

Quand le packaging devient-il soumis à la Loi Évin ?

Dès qu’il est reproduit à des fins publicitaires :

  • Packshot sur une affiche → Soumis
  • Photo de bouteille sur Instagram → Soumis
  • Visuel sur un site web promotionnel → Soumis
  • Vidéo mettant en scène la bouteille → Soumis

Exception e-commerce (jurisprudence José Garcia) :

  • Reproduction sur un e-shop aux seules fins d’information du consommateurNon soumis
  • Équivalent du rayonnage physique en magasin
  • Pas d’action de publicité ou de promotion
  • Simple présentation factuelle du produit disponible

Raison juridique : Interdire aux e-shops de montrer les bouteilles créerait une concurrence déloyale vis-à-vis des magasins physiques.

Conséquences pratiques pour les marques

Liberté créative sur le packaging :

  • Formes de bouteilles originales → Autorisé
  • Étiquettes créatives → Autorisé
  • Codes couleurs distinctifs → Autorisé
  • Messages marketing sur l’étiquette → Autorisé (hors reproduction publicitaire)

Jurisprudence Piper-Heidsieck (rouge à lèvres) :

  • Packaging en forme de rouge à lèvres avec claim « L’outil de séduction des femmes modernes »
  • Condamnation en référé civil (trouble manifestement illicite)
  • Mais : pas de condamnation pénale (Loi Évin stricto sensu)
  • Problème : la communication associée, pas le packaging lui-même

Limite : Si le packaging est tellement provocateur qu’il constitue en lui-même une forme de publicité ostentatoire, risque de trouble manifestement illicite (procédure civile, pas pénale).

Cas pratique : bouteille iconique sans communication

Question : Une marque avec une bouteille très distinctive, largement distribuée en GMS, peut-elle se dispenser de communication digitale ?

Réponse : Oui, stratégie juridiquement viable.

Avantages :

  • Bouteille non soumise à la Loi Évin en rayonnage
  • Pas de risque lié à la communication
  • Le packaging fait le travail de différenciation

Limites :

  • Pas de communication = pas de storytelling de marque
  • Dépendance totale à la distribution physique
  • Pas de présence digitale (désavantage concurrentiel)

Exemple théorique : Une bouteille de vin avec une forme unique (type bouteille Gauloise pour la bière) pourrait se contenter de sa présence en rayon sans campagne digitale, en toute conformité avec la Loi Évin.

Marques et noms : ce qui passe et ce qui casse

Principe : Le nom de la marque est soumis à la Loi Évin dès qu’il est utilisé en communication.

Ce n’est pas parce que l’INPI accepte l’enregistrement d’une marque qu’elle est Loi Évin compatible.

Exemple « Bellissima » (question réelle du podcast) :

  • « Bellissima » (très belle au féminin) → Risqué
  • Connotation beauté/séduction/valorisation personnelle
  • Claim « La boisson qui vous correspond » → Très risqué
  • Subjectif (pas informatif)
  • Incitatif (suggère que c’est LA boisson à choisir)
  • Valorisation personnelle

Reformulation impossible : L’intention même du claim (valorisation/incitation) est contraire à la Loi Évin. Il faudrait un claim totalement différent, informatif et objectif.

Noms à éviter :

  • Connotations séduction, beauté, passion
  • Références festives explicites
  • Promesses de réussite sociale
  • Tout ce qui n’est pas descriptif du produit

Noms acceptables :

  • Références géographiques (Château de X, Domaine Y)
  • Références historiques (Cuvée 1873)
  • Références techniques (Triple Fermentation)
  • Noms neutres sans connotation

V. Événements, dotations et mécénat : Les montages autorisés

Mécénat : mode d’emploi strict

Définition : Soutien désintéressé à un événement, organisation ou cause, sans attente de retour publicitaire.

Conditions de conformité :

  1. Communication sous raison sociale de l’entreprise (pas la marque d’alcool)
  2. Logo institutionnel différent du logo commercial
  3. Typographie et couleurs distinctes
  4. Mention discrète (page mécènes, dernière page de programme)
  5. Aucune campagne publicitaire associée

Jurisprudence Rock en Seine / Kronenbourg :

  • Kronenbourg avait utilisé un logo doré « Brasseries Kronenbourg » (institutionnel)
  • Différent du logo rouge et blanc « Kronenbourg » (commercial)
  • Mention discrète en bas d’affiche
  • Non condamné car respect des critères du mécénat

Limites strictes :

  • Pas de kakemonos sur le lieu de l’événement
  • Pas de posts Instagram « Nous sommes fiers de soutenir X »
  • Pas de campagne associée
  • Juste une mention factuelle dans les supports de l’événement

Intérêt pour la marque : Limité en termes de visibilité directe, mais :

  • Image de marque (RSE, engagement territorial)
  • Relation avec les parties prenantes locales
  • Avantages fiscaux (réduction d’impôt mécénat)

Dotations et cadeaux : terrain miné

Principe : Offrir de l’alcool est interdit (incitation à la consommation).

Exception : Dégustations professionnelles

  • Verres de 3 à 5 cl maximum
  • Dans des lieux autorisés (caves, bars, salons professionnels)
  • Jamais sur la voie publique
  • Identification du professionnel

Dotations pour événements :

  • Lot dans un concours → Risqué (peut être considéré comme incitation)
  • Cadeau client → Risqué
  • Échantillons promotionnels → Très encadré (contexte professionnel uniquement)

Alternative : Bons d’achat, réductions, invitations à des événements (sans consommation obligatoire).

Événements de marque : comment les organiser en conformité

Lancement de produit, soirée de marque :

Format conforme :

  1. Invitation privée (pas d’appel public)
  2. Liste d’invités ciblés (professionnels, prescripteurs, presse)
  3. Pas de communication publique avant/pendant/après
  4. Dégustation encadrée (petits volumes, contexte professionnel)
  5. Message sanitaire sur tous les supports internes

Format à risque :

  • Open bar annoncé publiquement
  • Communication Instagram en direct
  • Invitation large via réseaux sociaux
  • Mise en scène festive/conviviale

Cas particulier des salons professionnels :

  • Stand avec dégustation → Autorisé (contexte B2B)
  • Communication sur le stand → Soumise à la Loi Évin
  • Pas de mise en scène festive, pas de musique associée
  • Verres de dégustation (petits volumes)

Erreur fréquente : Photos de l’événement postées sur LinkedIn avec verres à la main, ambiance festive → Contamination de la communication par la Loi Évin.

VI. Stratégie « sans alcool » et extensions de gamme : L’eldorado réglementaire ?

Le paradoxe français du « sans alcool »

Définition légale : Boisson à moins de 1,2% d’alcool = « sans alcool » en France.

Paradoxe souligné par Benjamin Gourvez :

« On veut faire de la prévention sur la non-consommation d’alcool, mais on appelle légalement ‘sans alcool’ quelque chose qui a quand même de l’alcool. C’est complètement hérétique. »

Comparaison internationale :

  • Pays anglo-saxons : Distinction claire
  • « No alcohol » (0,0%)
  • « Low alcohol » (traces, clairement indiqué)
  • France : « Sans alcool » peut contenir jusqu’à 1,2%

Risque pour les personnes en abstinence : Une personne en sevrage peut consommer une « bière sans alcool » à 1,2% en pensant qu’elle est à 0%, avec risque de rechute.

Jurisprudence Heineken 0.0 : le piège de la marque commune

Contexte : Heineken lance Heineken 0.0 et souhaite communiquer librement, considérant que ce n’est pas de l’alcool.

Raisonnement de Heineken :

  • Produit < 1,2% = pas d’alcool
  • Loi Évin = communication sur l’alcool
  • Donc : pas soumis à la Loi Évin

Décision de justice : Condamnation

Motif : « Heineken 0.0 » fait directement référence à la marque « Heineken » (alcoolisée). C’est de la publicité indirecte pour la marque d’alcool, même si le produit promu ne l’est pas.

Conséquence : Toute communication sur « Heineken 0.0 » reste soumise à la Loi Évin (thèmes autorisés, message sanitaire, etc.).

Créer une marque sans alcool conforme : le mode d’emploi

Règle d’or : Séparation totale de la marque alcoolisée.

Checklist de conformité :

  1. Nom de marque différent (pas « Marque X 0.0 »)
  2. Logo distinct (forme, typographie, style)
  3. Charte graphique différente (couleurs, codes visuels)
  4. Pas de référence à la marque mère dans la communication
  5. Positionnement propre (pas « la version sans alcool de X »)

Exemple théorique conforme :

  • Marque alcool : « Les Brasseurs du Mont Blanc »
  • Marque sans alcool : « Altitude » (nouveau nom)
  • Logo : Montagne stylisée (vs logo brasserie)
  • Couleurs : Bleu/blanc (vs rouge/or de la marque alcool)
  • Positionnement : « La bière des sommets, naturellement sans alcool »

Exemple non conforme :

  • « Les Brasseurs du Mont Blanc 0.0 »
  • Même logo avec ajout « 0.0 »
  • Mêmes couleurs
  • Tagline : « Toute la saveur de Mont Blanc, sans l’alcool »

Cas limite : Marque déposée par la même société

  • Autorisé : Même personne morale peut avoir plusieurs marques
  • Condition : Les marques doivent être visuellement et conceptuellement distinctes
  • Pas de renvoi de l’une à l’autre dans la communication

Sponsoring sportif avec le sans alcool : enfin possible ?

Réponse : Oui, mais sous conditions strictes.

Ce qui devient possible :

  • Logo de la marque sans alcool sur maillot de club sportif
  • Naming d’un tournoi (« Tournoi Altitude »)
  • Activation en fanzone
  • Visibilité en stade (panneaux, kakemonos)
  • Campagnes publicitaires associant la marque et le sport

Conditions impératives :

  1. Marque totalement distincte de toute marque alcoolisée
  2. Produit réellement < 1,2% (vérifiable en laboratoire)
  3. Pas de publicité indirecte pour une marque alcoolisée
  4. Respect des règles générales de publicité (pas de Loi Évin, mais autres réglementations)

Vérifications à faire :

  • Règles spécifiques du stade/événement
  • Réglementation locale (arrêtés municipaux)
  • Conditions d’utilisation des plateformes (si communication digitale)

Opportunité stratégique : Le sans alcool devient le seul moyen légal pour une marque de boissons d’être visible dans le sport en France.

Extension de gamme : les erreurs à éviter

Erreur n°1 : Lancer un sans alcool avec le même nom + « 0.0 »

  • Exemple : « Brasserie Martin 0.0 »
  • Problème : Publicité indirecte pour « Brasserie Martin » (alcool)
  • Conséquence : Communication soumise à la Loi Évin malgré l’absence d’alcool

Erreur n°2 : Codes visuels trop proches

  • Exemple : Même logo, mêmes couleurs, juste un badge « 0.0% »
  • Problème : Confusion visuelle = publicité indirecte
  • Risque : Requalification en publicité pour l’alcool

Erreur n°3 : Communication croisée

  • Exemple : Post Instagram montrant les deux gammes (alcool + sans alcool)
  • Problème : Contamination – le post devient soumis à la Loi Évin dans son intégralité
  • Conséquence : Risque de non-conformité si éléments non autorisés

Bonne pratique : Comptes sociaux séparés

  • Compte A : Marque alcoolisée (Loi Évin stricte)
  • Compte B : Marque sans alcool (liberté de communication)
  • Jamais de cross-promotion entre les deux

Le cas des hard seltzers, kombuchas et boissons hybrides

Hard seltzers (généralement 4-5% d’alcool) :

  • Soumis à la Loi Évin comme toute boisson alcoolisée
  • Pas d’exception malgré le positionnement « léger » ou « rafraîchissant »
  • Attention aux codes visuels (plage, été, sport) → Très risqués

Kombucha :

  • Versions < 1,2% → Pas soumis à la Loi Évin
  • Versions > 1,2% → Soumis à la Loi Évin
  • Attention : Certains kombuchas artisanaux peuvent dépasser 1,2% en fermentation
  • Obligation d’indiquer le degré d’alcool si > 1,2%

Boissons « hybrides » (type bière + jus de fruits) :

  • Si > 1,2% → Soumis à la Loi Évin
  • Pas d’exception pour le côté « fruité » ou « doux »
  • Communication : rester sur les thèmes autorisés (composition, origine, etc.)

VII. Mineurs, jeunes publics et messages sanitaires : la protection renforcée

Interdiction de cibler les mineurs : principe absolu

Article L3323-2 : La publicité pour l’alcool ne peut être diffusée sur des supports majoritairement destinés aux mineurs.

Définition « majoritairement » : Seuil généralement admis de 60-70% de l’audience.

Exemples d’interdiction :

  • Snapchat : Majoritairement mineur → Interdit
  • Magazines jeunesse → Interdit
  • Chaînes YouTube pour enfants → Interdit
  • Événements scolaires → Interdit

Cas limite : TikTok

  • Avant 2023 : Majoritairement mineur → Interdit
  • Depuis 2023 : Majoritairement majeur → Autorisé (sous conditions)
  • Obligation : Ciblage +18 ans dans les paramètres

Ciblage par âge : obligations techniques

Sur les réseaux sociaux :

Ciblage positif (recommandé) :

  • Cibler uniquement les 18 ans et plus
  • Paramètre disponible sur Meta (Facebook/Instagram), TikTok, YouTube

Ciblage négatif (alternative) :

  • Exclure les moins de 18 ans
  • Même effet, approche différente

Restriction géographique :

  • Possibilité d’exclure la France pour un compte international
  • Utile pour marques exportatrices souhaitant communiquer librement à l’international

Sur YouTube :

  • Paramètre de restriction d’âge sur les vidéos
  • Possibilité d’exclure des pays (dont la France) de la diffusion
  • Cas d’usage : Trailer de marque diffusé uniquement hors France

Limites : Ces paramétrages ne garantissent pas une conformité totale (VPN, fausses déclarations d’âge), mais démontrent la bonne foi de la marque.

Messages sanitaires : règles de 2025

Message obligatoire (inchangé) : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération. »

Spécifications techniques (Recommandation ARPP 3.3) :

Format :

  • Exclusivement horizontal
  • Caractères imprimés en gras
  • Couleur tranchant avec le fond
  • Taille minimale : 1/100e de (hauteur + largeur) de l’annonce

Placement :

  • Sur chaque publication (post, story, vidéo)
  • Sur la photo OU dans le texte (pas obligatoirement les deux)
  • Pas d’obligation de position (début/fin), mais doit être visible et lisible

Cas particuliers :

Stories Instagram/TikTok :

  • Sur chaque story si série de stories
  • Taille adaptée à la lecture mobile
  • Contraste suffisant (éviter fond blanc/texte blanc)

Vidéos :

  • Affichage pendant toute la durée OU
  • Affichage au début et à la fin (minimum 3 secondes)
  • Taille lisible (pas de micro-caractères)

Bio de profil :

  • Pas d’obligation légale stricte
  • Recommandé par précaution
  • Formulation possible : « Compte officiel [Marque]. L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. »

Évolutions possibles du message sanitaire

Recommandations européennes (non appliquées en France à ce jour) :

  • Remplacer par « L’alcool provoque le cancer« 
  • Ou « L’alcool tue« 
  • Ajout d’images choc (type paquets de cigarettes)

Position de Benjamin Gourvez :

« On va progressivement vers des bouteilles d’alcool comme des paquets de cigarettes, avec un foie en cirrhose et marqué ‘L’alcool tue’. C’est l’objectif dans la tête de certains acteurs, même si ce n’est pas publiquement assumé. »

Tendance 2025-2030 : Durcissement probable, mais pas de changement immédiat.

Protection des mineurs dans les lieux de vente

Réglementation :

  • Interdiction de vente aux moins de 18 ans (pas de changement)
  • Obligation de contrôle d’identité en cas de doute
  • Sanctions pour le vendeur ET l’établissement

Expérimentation La Réunion (2024) :

  • Interdiction des boissons alcoolisées réfrigérées en supermarché
  • Objectif : Limiter les achats impulsifs
  • Statut : Expérimentation locale, pas de généralisation nationale prévue

Périmètre scolaire :

  • Proposition de loi : Interdiction de communication dans un rayon de 250 mètres autour des écoles
  • Statut : Non adoptée (contexte parlementaire instable)
  • Si adoptée : Impact majeur sur l’affichage urbain (quasi-zéro panneau possible à Paris)

VIII. Sanctions, contrôles et risques juridiques : ce que vous risquez vraiment

Nature des sanctions : pénal avant tout

Principe fondamental : La Loi Évin est une loi pénale.

Conséquences :

  • Poursuites devant le tribunal correctionnel
  • Peines d’amende (qui vont au Trésor Public)
  • Possibilité de peines complémentaires (interdiction temporaire de communiquer)
  • Casier judiciaire en cas de condamnation

Interprétation stricte : En droit pénal, on ne peut être condamné que pour ce qui est explicitement interdit dans la loi. D’où l’importance de l’analyse mot à mot des textes.

Qui peut poursuivre ?

Acteurs habilités :

  1. Parquet (rarement actif sur la Loi Évin)
  2. Associations agréées (notamment Addictions France, ex-ANPAA)
  3. DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) – contrôles, mais pas de poursuites Loi Évin directes

En pratique : 90% des poursuites sont initiées par Addictions France.

Modus operandi d’Addictions France :

  • Surveillance des campagnes publicitaires
  • Constats d’huissier (commissaire de justice)
  • Mise en demeure préalable (parfois)
  • Assignation devant le tribunal correctionnel
  • Communiqué de presse en cas de condamnation

Délai de prescription : 6 ans à compter de la diffusion de la publicité (infraction instantanée).

Montants des sanctions : la réalité des chiffres

Fourchette observée :

  • Minimum : 5 000 € (petites infractions, premiers manquements)
  • Médiane : 15 000 – 25 000 € par infraction
  • Maximum observé : 75 000 € (maximum légal par infraction)

Jurisprudence José Garcia :

  • Titres de presse : « 100 000 € d’amende » → Faux
  • Réalité : Cumul de 5 condamnations distinctes
  • Sanction la plus élevée : 20 000 €
  • Total cumulé : ~100 000 € (toutes parties confondantes)

Multiplicité des infractions :

  • Chaque support = une infraction potentielle
  • Chaque diffusion = une infraction potentielle
  • Exemple : Campagne affichage dans 10 villes = potentiellement 10 infractions

Facteurs aggravants :

  • Récidive
  • Ampleur de la campagne
  • Ciblage de mineurs
  • Caractère particulièrement incitatif

Facteurs atténuants :

  • Première infraction
  • Retrait rapide de la campagne
  • Bonne foi démontrée
  • Faible diffusion

Risque de contrôle : qui vérifie quoi ?

DGCCRF :

  • Contrôles en magasins, salons, événements
  • Vérification de l’étiquetage (règlement INCO)
  • Vérification des mentions obligatoires
  • Attention : La DGCCRF ne vérifie pas systématiquement la conformité Loi Évin
  • Un contrôle DGCCRF sans remarque ≠ conformité Loi Évin garantie

Addictions France :

  • Surveillance active des campagnes publicitaires
  • Veille sur les réseaux sociaux
  • Constats d’huissier sur les affichages publics
  • Analyse des campagnes TV/radio

ARPP (Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité) :

  • Organisme déontologique (pas de pouvoir de sanction pénale)
  • Avis consultatifs sur la conformité des campagnes
  • Recommandations (dont la fameuse Recommandation Alcool)
  • En cas de manquement : Avis défavorable (impact réputationnel)

Conseil : Faire valider les campagnes importantes par l’ARPP avant diffusion (service « Conseil & Avis »).

Procédures civiles vs pénales : deux logiques différentes

Procédure pénale (Loi Évin stricto sensu) :

  • Interprétation stricte de la loi
  • Présomption d’innocence
  • Charge de la preuve sur l’accusation
  • Sanctions : Amendes pénales

Procédure civile (référé, trouble manifestement illicite) :

  • Interprétation plus souple
  • Notion de « trouble manifestement illicite » (large)
  • Rapidité de la procédure (urgence)
  • Sanctions : Interdiction de diffusion, astreinte, dommages-intérêts

Exemple : Jurisprudence Piper-Heidsieck (rouge à lèvres)

  • Condamnation civile : Trouble manifestement illicite
  • Pas de condamnation pénale : Conditionnement non soumis à la Loi Évin stricto sensu

Stratégie d’Addictions France : Privilégie le pénal (impact médiatique, sanctions dissuasives), mais peut utiliser le civil en urgence.

Gestion de crise : que faire en cas de mise en cause ?

Étape 1 : Réception d’une mise en demeure

  • Ne pas ignorer (aggrave la situation)
  • Consulter un avocat spécialisé immédiatement
  • Analyser la mise en demeure : fondée ou non ?
  • Retirer la campagne si manifestement non conforme (limite les dégâts)

Étape 2 : Constat d’huissier

  • Signifie qu’une procédure est en cours
  • Figer les preuves de votre côté (captures d’écran, archives)
  • Préparer la défense avec votre avocat
  • Ne pas modifier la campagne a posteriori (aggrave la situation)

Étape 3 : Assignation devant le tribunal

  • Délai de 2 ans en moyenne entre la campagne et l’audience
  • Préparer une défense solide (interprétation stricte, bonne foi, contexte)
  • Évaluer l’opportunité d’une transaction (rare, mais possible)

Étape 4 : Jugement

  • Si condamnation : Possibilité d’appel (suspensif)
  • Si relaxe : Addictions France peut faire appel
  • Communiqué de presse quasi-systématique d’Addictions France si condamnation

Bonnes pratiques préventives :

  1. Validation juridique de toute campagne importante
  2. Formation des équipes marketing/communication
  3. Charte interne de conformité Loi Évin
  4. Revue régulière des publications sur les réseaux sociaux
  5. Veille sur les jurisprudences récentes

Le coût réel de la non-conformité

Coûts directs :

  • Amendes pénales : 5 000 – 75 000 € par infraction
  • Frais d’avocat : 10 000 – 50 000 € selon la complexité
  • Frais de justice (huissier, expertises) : 2 000 – 5 000 €

Coûts indirects :

  • Retrait de campagne en cours (investissements perdus)
  • Impact réputationnel (communiqué de presse Addictions France)
  • Perte de temps des équipes (procédure sur 2-3 ans)
  • Stress et mobilisation des dirigeants

Coûts d’opportunité :

  • Campagnes non lancées par excès de prudence
  • Créativité bridée par les contraintes réglementaires
  • Retard sur la concurrence internationale

Comparaison : Le coût d’une validation juridique préventive (1 000 – 5 000 € selon la campagne) est dérisoire comparé au coût d’une condamnation.

Cas Limites et zones grises : les questions sans réponse claire

Le cas des podcasts et contenus éditoriaux

Question : Un podcast comme SuperPotion™, qui parle d’alcool, est-il soumis à la Loi Évin ?

Réponse de Benjamin Gourvez : Non, si contenu éditorial pur.

Distinction cruciale :

  • Contenu éditorial (journalisme, analyse, interview) → Pas soumis à la Loi Évin
  • Contenu publicitaire (promotion d’une marque) → Soumis à la Loi Évin

Exemple SuperPotion™ :

  • Podcast sur le branding des boissons → Éditorial
  • Interview d’un brasseur sur son parcours → Éditorial
  • Promotion d’une bière spécifique avec incitation à l’achat → Publicitaire (Loi Évin)

Zone grise : Placement de produit

  • Mention d’une marque dans un podcast → Risqué si promotion explicite
  • Dégustation en direct → Très risqué
  • Partenariat rémunéré avec une marque → Soumis à la Loi Évin (publicité déguisée)

Protection : Liberté de la presse et liberté d’expression protègent le contenu éditorial authentique.

Livres, films, séries : l’alcool dans la culture

Principe : La culture (littérature, cinéma, séries) n’est pas soumise à la Loi Évin.

Exemple cité : Amélie Nothomb écrivant 10 pages sur le plaisir de boire du champagne → Autorisé (liberté de création)

Placement de produit :

  • Film avec bouteille de champagne visible → Toléré (contexte artistique)
  • Série avec consommation d’alcool → Toléré
  • Limite : Si placement de produit rémunéré et promotionnel → Peut basculer dans la publicité

Cas limite : Exposition d’art avec affiche de marque d’alcool

  • Jurisprudence : Exposition Fondation Louis Vuitton avec affiche d’artiste fumant une cigarette
  • Certaines régies de transport ont refusé la publicité (interprétation stricte Loi Évin tabac)
  • Débat : Où s’arrête l’art, où commence la publicité ?

Position de Benjamin Gourvez : « Il ne faut pas tomber dans l’hystérie. La Loi Évin ne vise pas la culture, elle vise la communication commerciale. »

Réalité virtuelle, métavers et NFT : le far west réglementaire

Question émergente : Comment la Loi Évin s’applique-t-elle aux nouveaux formats digitaux ?

Réalité virtuelle (VR) :

  • Expérience immersive de marque → Soumise à la Loi Évin (communication)
  • Visite virtuelle d’un vignoble → Acceptable si informatif (thème origine/terroir)
  • Bar virtuel avec marques d’alcool → Très risqué (incitation, ambiance festive)

Métavers :

  • Présence de marque dans un monde virtuel → Soumise à la Loi Évin
  • Événement virtuel avec alcool → Mêmes règles que l’événement physique
  • Avatar consommant de l’alcool → Représentation de consommateur (interdit)

NFT :

  • NFT représentant une bouteille → Soumis si élément de communication de la marque
  • Collection NFT d’une marque d’alcool → Soumis (publicité indirecte)
  • NFT artistique indépendant avec alcool → Liberté artistique (non soumis)

Absence de jurisprudence : Ces formats sont trop récents. Prudence maximale recommandée.

Intelligence artificielle et génération de contenu

Question : Un contenu généré par IA (image, vidéo) est-il soumis à la Loi Évin ?

Réponse : Oui, si diffusé par la marque.

Principe : Peu importe comment le contenu est créé (humain, IA, mixte), ce qui compte est :

  1. Qui le diffuse (la marque ?)
  2. Dans quel but (communication commerciale ?)
  3. Quel contenu (conforme aux thèmes autorisés ?)

Cas pratique :

  • Une marque utilise Midjourney pour créer un visuel de bouteille dans un paysage → Soumis à la Loi Évin
  • Respect des thèmes autorisés (origine, terroir si pertinent)
  • Pas de thème interdit (plage, fête, etc.)

Conclusion : Naviguer dans la complexité avec méthode

Les 10 commandements de la communication alcool en France

  1. Le risque zéro n’existe pas : Toute communication comporte un risque, l’objectif est de le minimiser.
  2. Tout ce qui n’est pas autorisé est interdit : Loi d’autorisation, pas d’interdiction. Ne pas chercher les failles.
  3. Informatif et objectif : La boussole ultime. Si votre contenu apporte une information objective sur le produit, vous êtes sur la bonne voie.
  4. Le conditionnement n’est pas soumis à la Loi Évin : Mais sa reproduction publicitaire l’est. Distinction cruciale.
  5. Publicité indirecte = publicité : Un logo, un nom, une couleur reconnaissable suffisent à déclencher la Loi Évin.
  6. Le sans alcool n’est pas de l’alcool : Mais uniquement si marque totalement distincte. Sinon, publicité indirecte.
  7. Une goutte d’alcool contamine tout : Si vous mentionnez l’alcool dans un contenu, tout le contenu devient soumis à la Loi Évin.
  8. Les réseaux sociaux ne sont pas une zone de non-droit : LinkedIn = Instagram = TikTok aux yeux de la Loi Évin.
  9. La formation vaut mieux que la sanction : Investir dans la connaissance de la loi est toujours rentable.
  10. En cas de doute, consulter : Un avocat spécialisé coûte moins cher qu’une condamnation.

Perspectives 2025-2030 : Vers un durcissement ?

Ludovic Mornand et Benjamin Gourvez anticipent une tendance au durcissement :

  • Propositions de loi régulières (même si non adoptées pour l’instant)
  • Pression des associations de santé publique
  • Influence des recommandations européennes
  • Expérimentations locales qui peuvent s’étendre

Scénario probable :

  • Message sanitaire plus dur (« L’alcool provoque le cancer »)
  • Restrictions accrues sur les réseaux sociaux
  • Périmètres d’exclusion autour des écoles
  • Possibles images choc (type paquets de cigarettes)

Scénario moins probable mais évoqué :

  • Packaging neutre (bouteilles noires avec nom en blanc, type tabac)
  • Interdiction totale de communication sur certains supports
  • Taxation accrue de la publicité alcool

Opportunités :

  • Le sans alcool devient le seul espace de liberté créative
  • Marques qui anticipent et créent des gammes 0.0% distinctes prennent de l’avance
  • L’éditorialisation (contenus de marque à valeur ajoutée) reste possible

Ressources complémentaires

Écouter l’épisode complet :

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Ressources externes :

Services Studio Blackthorns :
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Mentions légales

Cet article a une vocation purement informative et ne constitue pas un conseil juridique. Pour toute situation spécifique, consultez un avocat spécialisé en Loi Évin. Les propos tenus par Benjamin Gourvez dans cet épisode reflètent son analyse juridique au moment de l’enregistrement (2025) et sont susceptibles d’évoluer en fonction des jurisprudences et modifications législatives futures.


Article rédigé par l’équipe SuperPotion™ sur la base de l’épisode 64 du podcast, avec Benjamin Gourvez, avocat spécialisé Loi Évin. Durée de l’épisode : 160 minutes. Publication : 2025.

Loi évin - épisode 64 de SuperPotion™
Épisode 64 de SuperPotion™ présenté par Ludovic Mornand et accompagné de Benjamin Gourvez

FAQ Loi Évin

Ludovic Mornand

Ludovic Mornand

PODCASTER & BOSS FINAL

Ludovic est le fondateur et directeur de Studio Blackthorns et SuperPotion™. Il anime les émissions SuperPotion™, The Bottlefield Show et 1000 Hectos, toutes les trois spécialisées dans le secteur de la boisson.

« À travers ce podcast, à la fois fun et enrichissant, j’ai souhaité marquer mon empreinte d’expert dans le secteur de la boisson alcoolisée et non-alcoolisée en invitant des professionnels de l’industrie : brasseurs, distillateurs, vignerons, cavistes, journalistes. Mon but est d’apporter de l’inspiration à ces acteurs de la filière Potions pour les aider à sans cesse se renouveler. C’est ainsi qu’est né le podcast SuperPotion™, une émission divertissante et empreinte de nostalgie pop-culture pour les années 90s. SuperPotion, un élixir d’innovation pour sublimer toutes vos boissons ! »