La loi Évin expliquée : droits, devoirs et protection des marques de vins et spiritueux

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“Dès qu’on va inciter la consommation en disant que c’est merveilleux et que c’est formidable, que ça rassemble les gens, ça désinhibe, tout ça, c’est interdit. Tout ce qui est autour de la séduction, de la jeunesse : interdit. L’amour : interdit. Le glamour : interdit. On n’a même pas le droit de faire figurer des personnes qui ne sont pas des personnes du milieu. “Un ricard, des rencontres”, c’est interdit. Il faut vraiment jouer, en fait, sur le nom du produit, l’histoire du produit. Il faut toujours que ce soit rattaché aux caractéristiques objectives du produit. Mais ça ne veut pas dire qu’on n’a rien le droit de faire. Il faut toujours pouvoir justifier chaque élément de l’affiche par une caractéristique objective.”


Joséphine Roux, Jouffrois & Fileas

La loi Évin a eu 30 ans en 2021 ! Votée le 10 janvier 1991, cette loi prend en compte deux principaux déterminants de santé : le tabac et l’alcool. Ses objectifs étaient de réduire la consommation de tabac et d’alcool, d’informer sur les risques, de protéger les mineurs et de contrôler la mise en œuvre des mesures.

Cette loi est devenue en fil des ans, le symbole du bras de fer permanent entre les acteurs de la santé publique et les intérêts économiques. Autant les méfaits avérés du tabac ont rendu sa promotion totalement indéfendable. Autant, pour l’alcool, et notamment pour le vin c’est une autre histoire. Présenté par le secteur économique comme étant la boisson nationale apportant plaisir et convivialité, le débat a toujours été plus difficile. Mais si les 25 premières années ont tourné à l’avantage du lobby alcoolier, une prise de conscience progressive de l’opinion sur les conséquences de la consommation d’alcool dans notre pays change la donne, petit à petit.

Aujourd’hui, la loi Évin reste à la fois un garde-fou et une loi emblématique, considérée comme un modèle en Europe. Dans cet épisode de SUPER-POTION™, on va donc quitter le côté innovation et tendances marketing pour se concentrer davantage sur un volet indispensable des marques de boissons alcoolisées à savoir leur protection, leur juridiction, leurs droits et leurs devoirs. Pour ce faire, j’ai le plaisir d’accueillir Joséphine Roux, associée au sein du cabinet pluridisciplinaire Jouffroy & Fileas, qui regroupe notaires et avocats spécialisés en droit des affaires. ‍🎓

Ressources

Pour aller plus loin…

Les résultats de l’IRMf ont montré que non seulement les avertissements relatifs à la cigarette ne dissuadent pas de fumer, mais qu’en activant le noyau accumbens, ils semblent en fait encourager les fumeurs à s’allumer une cigarette. Nous n’avons pas pu nous empêcher de conclure que ces mêmes étiquettes d’avertissement destinées à freiner le tabagisme, à réduire les cancers et à sauver des vies étaient plutôt devenues un outil de marketing mortel pour l’industrie du tabac.

En 1997, en prévision de l’interdiction de la publicité pour le tabac qui était sur le point d’entrer en vigueur au Royaume-Uni, Silk Cut, une marque de tabac britannique populaire, a commencé à placer son logo sur un fond de soie violette dans toutes ses publicités. Il n’a pas fallu longtemps pour que les consommateurs associent cette bande de soie violette au logo Silk Cut, puis à la marque elle-même. Ainsi, lorsque l’interdiction de la publicité est entrée en vigueur et que le logo n’était plus autorisé sur les publicités ou les panneaux d’affichage, la société a simplement créé des panneaux d’affichage sur les autoroutes qui ne disaient rien sur Silk Cut ou les cigarettes, mais qui présentaient simplement des bandes de soie violette sans logo. Et devinez quoi ? Peu après, une étude a révélé que 98 % des consommateurs ont identifié ces panneaux d’affichage comme ayant un rapport avec Silk Cut, même si la plupart d’entre eux étaient incapables de dire exactement pourquoi. En d’autres termes, les efforts déployés par les fabricants de tabac pour associer des “images innocentes” – qu’il s’agisse de l’Ouest américain, de la soie violette ou des voitures de sport – ont été vains. Ils ont réussi à contourner les réglementations gouvernementales en créant des stimuli suffisamment puissants pour remplacer la publicité traditionnelle. Et de fait, ils ont même réussi à obtenir l’aide des gouvernements du monde entier ; en interdisant la publicité pour le tabac, les gouvernements contribuent involontairement à promouvoir le comportement mortel qu’ils cherchent à éliminer.

Quelles sont donc les publicités les moins puissantes pour vous inciter à fumer ? Les publicités pour le tabac sans mise en garde. Viennent ensuite les publicités avec des avertissements – qui rendent les publicités encore plus attrayantes – puis les produits dérivés (cendriers, casquettes, etc.). L’imagerie subliminale est encore plus puissante, notamment l’association Formule 1 / course NASCAR. Il est un peu effrayant de découvrir que ce que nous pensions avoir le moins à voir avec le tabagisme est en fait le plus efficace pour nous donner envie de fumer, et que le logo – que les publicitaires et les entreprises ont longtemps doté de pouvoirs quasi mythiques – est en fait celui qui fonctionne le moins bien.

Pouvez-vous imaginer un monde sans logos ? Pas de titres. Pas de titres d’appel. Pouvez-vous imaginer des publicités sans mots que vous pourriez regarder et savoir immédiatement quelle marque elles vendent ? De nombreuses entreprises, comme Abercrombie & Fitch et Ralph Lauren, et comme nous venons de le voir, Philip Morris, ont déjà commencé à utiliser des publicités sans logo, et avec beaucoup d’effet. À l’avenir, de nombreuses marques suivront le mouvement. N’oubliez donc pas que les messages subliminaux existent.

Buyology : How Everything We Believe About Why We Buy is Wrong
de Martin Lindstrom

Ludovic Mornand

Ludovic Mornand

PODCASTER & BOSS FINAL

Ludovic est le fondateur et directeur de Studio Blackthorns et SuperPotion™. Il anime les émissions SuperPotion™, The Bottlefield Show et 1000 Hectos, toutes les trois spécialisées dans le secteur de la boisson.

« À travers ce podcast, à la fois fun et enrichissant, j’ai souhaité marquer mon empreinte d’expert dans le secteur de la boisson alcoolisée et non-alcoolisée en invitant des professionnels de l’industrie : brasseurs, distillateurs, vignerons, cavistes, journalistes. Mon but est d’apporter de l’inspiration à ces acteurs de la filière Potions pour les aider à sans cesse se renouveler. C’est ainsi qu’est né le podcast SuperPotion™, une émission divertissante et empreinte de nostalgie pop-culture pour les années 90s. SuperPotion, un élixir d’innovation pour sublimer toutes vos boissons ! »